jueves, 29 de junio de 2017

tempête

La traversée du Montenegro ne dure que deux jours, mais que ce fut laborieux. La tempête qui s’abat sur le lac de Shkodra m’oblige à rebrousser chemin et m’offre LA frayeur de ce périple.

Jour 29 15 mai 2010  lac de Shkodra – Shkodra (106,5 km)

Tempête

Tôt ce matin une pluie d’orage vient secouer le toit de ma tente. Je me rendors un peu, puis commence à faire les sacs, en attendant que ça cesse. Je plie bagage sous une petite pluie, le ciel tout gris.

Je prends la direction de la route qui longe le lac par le sud, au flanc d’une montagne qui s’étire jusqu’en Albanie. La pluie double d’intensité, puis cesse à l’approche du pont qui permet de franchir un bras du lac. Route à gauche, voie ferrée à droite. Je m’engage sur le pont, mais suis rapidement pris par un vent de trois-quarts face.
Au milieu du pont, la violence du vent est telle que je suis obligé de descendre du vélo. Les rafales de plus en plus violentes m’obligent à tenir le vélo des deux mains tout en marchant et en poussant ma monture. Je vois venir le coup sans pouvoir réagir : une rafale s’engouffre dans mon porte-carte, et voici ma carte de l’Albanie qui s’envole dans le lac. L’Albanie avec une carte, c’était déjà pas gagné, mais alors sans …

J’arrive tant bien que mal au bout du pont, en m’aidant d’un muret qui sépare la route de la voie ferrée pour poser de temps à autre le vélo.
La route monte dans un petit bois abrité du vent. Je décide de poursuivre, me disant que la montagne devrait me protéger du vent. Je fais deux kilomètres jusqu’à ce qu’une véritable tempête me tombe dessus : vent d’une violence incroyable avec une pluie tellement cinglante qu’on croirait de la grêle. Je suis littéralement stoppé. Je ne peux ni avancer, ni reculer. Je pose le vélo sur la montagne, et tourne le dos au déluge qui s’abat sur moi. J’attends que l’orage diminue un peu avant de réussir à faire demi-tour au bout d’un quart d’heure.

Retour au petit bois, puis au pont, qu’il me faut à nouveau franchir, mais avec un vent plus redoutable qu’à l’aller. Il me semble qu’il diminue un peu d’intensité. Je m’engage doucement. Je ne suis pas encore au pont qu’une rafale me met à terre. Je relève le vélo tant bien que mal, et me jette sur une Mercédès garée sur la droite afin d’éviter qu’une seconde rafale ne m’envoie au fond du lac.
Toute cette scène se passe sous les yeux de deux cheminots, dont l’un assis dans sa voiture à dix mètres derrière moi, qui ne feront rien pour m’aider.

Je suis  littéralement coincé, appuyé sur la Mercédès, retenant le vélo en l’appuyant sur mon corps afin que la tempête ne l’emmène pas. J’attends que ça se calme. Mais ça empire. L’orage tonne et la pluie mêlée au vent redouble.
Puis sur ma droite un bruit fracassant : le toit d’une baraque posée au bord du lac vient d’être soulevé par une rafale plus mordante que les autres. C’est un amas de tôles et de bois qui vole et qui vient se jeter sur le pont, juste devant une estafette qui stoppe nette. L’occupant du véhicule, effrayé, n’ose plus reculer, d’autant que d’autres véhicules arrivent derrière.
Voici les trois-quarts de la chaussée bloqués par les débris, empêchant la circulation qui ne s’effectue que dans un sens. Et moi toujours bloqué contre ma Mercédès, avec les gens dans leur voiture qui me regardent en passant, tantôt éberlués, tantôt amusés.
Je fais signe à certains de venir m’aider. Haussements d’épaules. Ok, j’ai compris que sur ce pont, c’est chacun pour soi.

Je profite d’un bref instant de répit pour me jeter avec le vélo de l’autre côté de la route où le muret permet de le retenir, puis j’arrive à quitter le pont. Retour au petit bois. Je laisse cette fois-ci passer une demi-heure.
La pluie cesse, et le vent est moins fort. J’y retourne. La police est sur les lieux, et a réussi à dégager une partie des débris. Je m’engage cette fois-ci côté gauche, à pied, avec le muret comme protection au cas où le vent pousserait trop fort. Et au terme d’une progression laborieuse, j’arrive enfin à franchir ce maudit pont, et à quitter cet endroit infernal.
Ouf, que j’ai eu chaud sous la pluie !

La tempête disparaît quand je quitte le lac. A croire qu’elle est localisée à cet endroit.
Je retourne à Podgorica, où je mange entre deux averses, et prend la route de l’Albanie.
Je quitte l’ancienne Fédération des pays des Slaves du Sud comme j’y suis entré : sous la pluie.

Je franchis la frontière en milieu d’après-midi, et il me reste encore une épreuve : rejoindre la ville de Shkodra située à 35 kilomètres sur une route albanaise pleine de trous et d’ornières, avec de temps à autre une averse d’orage. Un poème.
J’arrive à Shkodra sous une pluie battante et à la nuit tombante. Sur la place centrale, j’avise un grand bâtiment de style soviétique au sommet duquel est inscrit hôtel.

Celui-ci, je l’ai bien mérité !

tempête sur le lac de Skodra


Podgorica, temple orthodoxe

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